3. Lymphomes oculocérébraux primitifs

– Rôle du BCR dans le développement des tumeurs lymphoïdes : modèle de lymphome oculocérébral (LOC) (M Le Garff-Tavernier, C. Bravetti, F Davi).

Le lymphome primitif du système nerveux central (LPSNC) est une forme rare et sévère de lymphome B diffus à grandes cellules, confiné au cerveau, à la moelle épinière et aux méninges, souvent avec une atteinte oculaire mais sans extension périphérique. L’hôpital de la Pitié-Salpêtrière dispose d’un panel de recrutement exceptionnel pour ce type de tumeur et est un centre expert national pour la coordination du réseau LOC accrédité par l’INCa. Notre équipe travaille depuis des années à optimiser le diagnostic biologique et le suivi des patients.

Notre laboratoire a développé une large gamme de techniques cellulaires (cytologie, cytométrie en flux multiparamétrique, tests de clonalité lymphoïde et tests de mutation ciblée par NGS) pour optimiser la détection des cellules de lymphome dans des liquides précieux tels que le liquide céphalorachidien (LCR) et des échantillons intraoculaires (humeur aqueuse et vitrée) (Armand Met al, Am J Hematol. 2019 et Bravetti C et al, Br J Haematol. 2023). Nous avons récemment entamé une collaboration avec l’équipe du Dr B. Mathon, qui nous fournit du liquide d’irrigation issu de biopsies stéréotaxiques à des fins diagnostiques. Ce fluide riche en cellules nous permet de fournir des résultats rapides en une journée grâce à des techniques de cytologie/cytométrie qui complètent l’histologie réalisée directement sur la biopsie, optimisant ainsi le parcours diagnostique du patient. Nous avons également développé des approches complémentaires pour quantifier des biomarqueurs solubles tels que l’IL-10 et l’IL-6 dans les liquides intraoculaires. L’IL-10 s’avère également très prometteuse en tant que marqueur pour le suivi de la maladie (réponse au traitement, progression de la maladie ou rechute), et nos travaux récents indiquent qu’elle pourrait être utilisée comme marqueur d’une maladie résiduelle minime (thérapie cellulaire CAR-T). Nous poursuivrons ce travail en évaluant d’autres biomarqueurs solubles, tels que les indicateurs pronostiques identifiés sCD19, CXCL13 et sCD25. Nous sommes laboratoire de biologie médicale de référence (LBMR) pour le diagnostic des lymphomes oculocérébraux et nous sommes centre expert du réseau national LOC, réseau national d’expertise médicale créé en 2011 dans le cadre du Plan Cancer, reconnu et financé par l’Institut National du cancer. Dans ce cadre, nous participons aux protocoles du réseau, notamment PRT-K LOC-R01 pour les dosages de cytokines.

Dans un précédent travail, nous avons démontré dans le lymphome primitif vitréo-rétinien (LPVR, variété de LOC), et dans une moindre mesure dans le LPSNC, un biais de répertoire majeur des régions variables Ig de leur BCR, avec en outre une diversité intraclonale liée au Processus HMS (Belhouachi N et al, Blood Adv. 2020). Ces données suggèrent l’existence d’une stimulation antigénique continue des cellules tumorales in vivo, qui pourrait jouer un rôle important dans la croissance tumorale. Cependant, ces résultats doivent être affinés avec des techniques plus résolutives (NGS). Nous prévoyons ensuite de caractériser en détail leur répertoire BCR par séquençage NGS des régions variables de leurs chaînes lourdes et légères d’Ig. En particulier, nous étudierons l’architecture clonale de leur BCR à l’aide du logiciel ViCloD mentionné ci-dessus. Ceci sera comparé à l’architecture clonale au niveau oncogènique. Ce travail sera complété par des analyses single-cell.

Nous postulons également que les cellules tumorales peuvent reconnaître in situ des antigènes favorisant leur localisation et leur développement ectopique. Nous avons établi une collaboration avec le Dr K. Stomatopoulos (CERTH, Thessalonique, Grèce) dont l’équipe possède l’expertise nécessaire pour produire des anticorps recombinants à partir de BCR dérivés de cellules leucémiques. Des anticorps recombinants issus de BCR de LPVR sont actuellement en cours de synthèse. Ils seront testés sur des « protein arrays » (auto-antigènes, antigènes microbiens), des extraits protéiques issus de biopsies oculaires et cérébrales, ainsi que sur des coupes de ces mêmes tissus. Les antigènes cibles les plus pertinents seront testés fonctionnellement sur des lignées de lymphomes B transfectées avec les BCR correspondants.